vendredi 20 juin 2008

RÉGIME MORTEL


Croisons les doigts… pourvu qu'Éric Nataf est fait un cauchemar le jour où il a décidé d'écrire ce roman… Sinon, gare à nous !

L'auteur est médecin, radiologue et échographe. Il s'est imposé avec "Autobiographie d'un virus" et l'incroyable "Mal par le mal" qui mettait en scène des meurtres "homéopathiques". Absolument génial, je vous le conseille.

Dans Régime Mortel, on entre dans le domaine des alicaments, cette branche récente de l'industrie alimentaire qui va, au fil des années, nous proposer des produits censés être "bons" au goût et pour notre santé. Mais que doit-on penser des compétences réelles des laitiers devenus fabricants de yaourt et qui seront bientôt des prescripteurs de produits à vocation sanitaire ? 
C'est toute la question que pose Éric Nataf. Et, sa réponse demeure quelque peu inquiétante. 
Certes, réjouissons-nous, il ne s'agit que d'un roman, un thriller médical à la française. Quand même, je conserve, après cette lecture, une certaine aversion au mélange des genres. Pitié, que les laitiers demeurent de simples laitiers et les professionnels de la santé sauront où est leur place.
Fascinant et diaboliquement bien écrit… 
Une chose est certaine, avec ce thriller qui nous plonge dans le monde des obèses au régime, on ne reste pas sur sa faim !
Judith Lossmann


Régime Mortel d'Éric Nataf aux Éditions Odile Jacob – 558 pages - 21 euros

LA CHAMBRE AUX ÉCHOS


Ici, Richard Powers poursuit sa réflexion sur les responsabilités individuelles, la science et ses limites et le sens de l'histoire.

Tout commence comme dans un classique film américain à rebondissements. Une nuit, Mark est victime d'un accident. Il est laissé pour mort avec à côté de lui, une étrange note anonyme. Conduit à l'hôpital, il est veillé par Karine, sa sœur, obligée au vu des circonstances de revenir dans sa ville natale, quittée des années plus tôt. 
Mark est dans un coma profond. Un légume qui pourtant petit à petit va se réveiller, sortir de sa léthargie et réapprendre à vivre. Sauf qu'il ne reconnaît pas Karine. Il admet qu'elle est un sosie parfait de sa sœur mais diagnostiqué syndrome de Capgras, Mark est incapable d'associer les visages familiers aux émotions qu'il devrait ressentir. Karine fait alors intervenir le célèbre neurologue, Gerald Weber, qui va tenter avec difficulté de refaire le chemin des événements qui ont "provoqué" l'accident de Mark.

Ce roman lent et lourd de sens, écrit tout en subtilité et en savoirs, demande que l'on prenne le temps de le pénétrer. Le travail du lecteur s'assimile peu à peu à la quête de Karine et aux redécouvertes de Mark. Reconstruire son cerveau n'est pas une mince affaire et l'auteur avec un talent nous conduit par la main jusqu'à la fin de l'histoire et son étonnante surprise.

Judith Lossmann

La chambre aux échos de Richard Powers aux Éditions Le cherche Midi, 480 pages – 23 euros.

POUR EN FINIR AVEC LE VIEUX SOCIALISME



Pour en finir avec le vieux socialisme…De façon pas piquée des hannetons !

Voilà un livre politique qui, en dépit de son titre, n’a rien du poncif…Étonnant, pour le moins. Pour en finir avec le vieux socialisme…Et être enfin de gauche !, l’entretien de Manuel Valls avec le journaliste politique Claude Askolovitch, publié aux éditions Robert Laffont, est quelque peu… atypique ! 

Prenons d’abord la forme. Dans ce livre, messieurs Valls et Askolovitch se tutoient ; une façon d’en finir avec l’hypocrisie habituelle, qui consiste à être proches, intimes parfois, hors caméra, et à servir du « vous » à tour de bras devant les téléspectateurs, en l’occurrence, les lecteurs. Les deux hommes se connaissent depuis longtemps et l’on apprécie cet état de fait. Pourquoi ? Élémentaire mon cher citoyen, parce qu’à un ami, on sert difficilement de la langue de bois, au risque de se retrouver raillé dans la minute, ce que Claude Askolovitch ne se prive pas de faire, parfois. L’avertissement est donné, d’entrée, par les comparses : « Nous nous connaissons depuis vingt-six ans, sommes amis dans la vraie vie, ce qui n’empêche ni les désaccords, ni les engueulades, ni d’ailleurs les convergences et les complicités ». 
Et du fond…Qu’en dire ? Le pire et le meilleur. Rien de neuf sous le soleil rose, crépusculaire peut-être mais pas tout à fait couchant, des socialistes. Le député-maire d’Évry est de gauche car, depuis l’enfance, la droite lui a été désignée comme le mal incarné. Alors tout peut vriller dans la mécanique socialiste, cette chose-là ne peut pas changer (Rien à voir avec monsieur Eric Besson donc, dont le même Claude Askolovitch avait, également, été le confesseur). 
Pourtant, et c’est là que ça devient intéressant, Manuel Valls reconnaît qu’il faut tout remettre à plat. Tout détruire pour tout reconstruire. Même le nom…Socialiste, c’est dépassé ! D’aucun aurait peut-être dit vieilli, usé, fatigué, mais c’était un autre temps. Royal aussi, dépassée. Celle qu’il a pourtant soutenue, fût un temps, en prend pour son grade « C’était un one shot. C’est raté ». Valls n’est pas un réparateur, ni un colmateur, c’est un bâtisseur. Un blairiste dans l’âme, dans la technique tout du moins. Cassons tout, déblayons, et reprenons le chantier à zéro . Il n’est pas le seul, mais ses propositions pour ce faire ont le mérite de tenir la route…Parfois. Car détruire d’accord, mais quoi reconstruire sur les gravas ? Et c’est là que le bât blesse malgré tout. Valls propose plus que Dray, Moscovici et consorts ; mais plus que rien ça continue de faire pas grand-chose. Quand il dit qu’il faut allonger la durée de cotisation pour sauver le régime des retraites, force est de constater qu’il ne révolutionne pas la roue. Et, lorsqu’il veut réconcilier la gauche et le monde de l’entreprise, il enfonce, jusqu’au bout, des portes déjà grandes ouvertes. Mais ça sonne juste, convaincu, et parfois même convaincant, ce qui est déjà méritoire. 
Son modèle, c’est SarkoBlair… Pas vraiment de gauche tout ça, mais qu’importe. Notre actuel président a su « ré-identifier la droite », Valls veut être celui qui va « ré-identifier la gauche ». Les idées de Monsieur Valls tiennent néanmoins la route. L’ensemble reste prometteur. En politique, on reste jeune longtemps…
Tristane Banon

Manuel Valls. Pour en finir avec le vieux socialisme…Et être enfin de gauche ! Entretiens avec Claude Askolovitch, Éditions Robert Laffont. 198 pages, 19 euros.

LE DERNIER ÉVANGILE


Troisième roman de l’auteur, le Dernier Evangile remet en scène Jack Howard et Costas Katzanzakis, les deux archéologues spécialistes de l’histoire sous-marine déjà présents dans Atlantis et dans Le Chandelier d’Or. 

Cette fois, c'est la découverte d'une épave de navire du 1er siècle après JC qui cachait une amphore signée de la main de Saint-Paul qui met le feu aux poudres. Dans le même temps, Maria, la collègue de Jack, découvre à Herculanum, un document écrit de la main même de Jésus. Une découverte, qui avérée, bouleverserait les fondements de la chrétienté. Entre ceux qui veulent mettre à jour leurs découvertes et ceux, sombres et noirs qui veulent l'enfouir à jamais, le combat fait rage.

David Gibbins nous livre ici, une excellente histoire d’aventures sans prétention, aux évocations historiques fascinantes. Les héros sont sympathiques et les méchants très méchants.
Judith Lossmann

Le dernier évangile de David Gibbins aux éditions First Éditions – 432 pages – 21,90 euros.

UNE NOUVELLE CHANCE


Un roman de filles comme on les aime…

À 37 ans, on ne peut pas dire qu'Annie Hillman soit le parfait exemple d'une vie réussie : elle est mariée en instance de divorce, mère de deux fils qui ne se supportent plus, criblée de dettes et au chômage. Rude portrait.

Acculée, elle retourne vivre dans la petite ville de son enfance, là où elle s'est construite et parfois déconstruite. Oscillant entre passé et présent, l'auteure Holly Kennedy mène la danse de la vie et l'on comprend bien vite que des secrets lourds à porter se cachent dans les fondations intimes d'Annie.
Des secrets qui semblent la poursuivre.

En effet, qui est donc ce mystérieux inconnu, qui passe une annonce en première page du journal local, pour annoncer à la face du monde qu'Annie fut son premier amour et qu'il veut la retrouver.

Est-ce que la vie va lui offrir un nouveau départ ?

Judith Lossmann

Une nouvelle chance de Holly Kennedy aux éditions Belfond – 348 pages – 19,50 euros.

jeudi 5 juin 2008

DERNIER ÉTÉ À PARIS


Un si bel été à Paris…

Abha Dawesar est indienne, d’origine ; parisienne, parfois ; New-Yorkaise, à l’occasion ; et merveilleuse romancière à perpétuité !
Rien ne dure la vie, mais tout de même.

Cet auteur de trente-quatre ans, diplômée de Harvard, avait déjà fait parlé d’elle avec son très remarqué Babyji, roman qui a reçu moult récompenses internationales, à en faire pâlir toute auteur germanopratine qui se respecte. Et force est de constater, à l’époque déjà, que c’est justifié (Babyji est, d’ailleurs, en cours d’adaptation cinématographique).

Voilà que la belle réitère l’exploit du roman-bijou. Ça va finir par déprimer sévère au sein de la jeunesse littéraire de Saint-Germain !

Et pourtant, son Dernier Été à Paris, paru il y a peu aux éditions Héloïse d’Ormesson, mêle l’art et l’amour dans un Paris rarement si bien décrit.

L’histoire ? Le dernier amour du célèbre écrivain indien Prem Rustum, de soixante-quinze ans tout de même, avec une jeune écrivain new-yorkaise, Maya, rencontrée sur le Net.
Dit comme ça, on pourrait croire à un banal conte romantique pour jeune femme en mal de battements de cœur. C’est faire fi de l’extrême savoir-faire de l’auteur qui passe de l’art à la gastronomie , la culture ou même la sculpture pour lier, définitivement, ses deux amants.
Mais pas que….Abha pousse plus loin les choses, au-delà de l’histoire, là où le lecteur appréciera, forcément, une véritable réflexion permanente sur l’écriture, le processus littéraire, la posture de l’écrivain, l’importance de la littérature…Ça sonne sérieux, mais ça se lit vrai.

Et d’abord, comment voit-on arriver la mort ? Avec des résurgences encombrantes des amours passées, des souvenirs d’incestes enfouis ? Peut-être, la réponse se lit, avec délectation, dans les pages d’Abha.

Je proposerai bien le « satisfait ou remboursé » tant, pour rester dans la réclame, « l’essayer c’est l’adopter « , mais l’œuvre d’Abha Dawesar est au-dessus de ça. Alors je vous le promets, c’est tout. 
Tristane Banon


Dernier été à Paris. Éditions Héloise d’Ormesson. Traduction de l’anglais (Inde) par Laurence Videloup. 368 pages. 22 euros. Babyji vient de sortir en livre de poche, dans la collection 10/18.


BIENTÔT, UN NOUVEAU LIVRE SIGNÉ TRISTANE BANON



DES HORIZONS ROUGE SANG


Voici la suite tant attendue des Mensonges de Locke Lamora ! Vous aviez aimé le tome 1, vous allez adorer le tome 2. C'est encore plus envoûtant !

Le premier roman de Scott Lynch avait été l’événement Fantasy de ces dernières années et la suite promet d’être elle aussi un réel succès.
Locke Lamora et Jean Tannen ont fui leur cité natale pour s’attaquer à l’Aiguille du péché, une maison de jeu réservée à l’élite et voler son merveilleux trésor… Mais il n'y a qu'une seule façon de s'approprier l'argent de cet établissement : le gagner aux jeux. Un domaine que Locke et Jean croient connaître sur le bout des doigts.
Évidemment, rien ne va se passer comme prévu et les deux compères vont se retrouver embringués dans des aventures imprévues... en autre faire face à la flotte pirate de la redoutable capitaine Zamira Drakasha.
Et pendant ce temps, ailleurs, les Mages Esclaves organisent leur revanche contre celui qui les a humiliés : un certain Locke Lamora, qui pense avoir échappé à leur châtiment.

Des horizons rouge sang de Scott Lynch aux Éditions Bragelonne, 25 euros

LA SCÉNE AMÉRICAINE


Un étonnant livre de voyage

Henry James, américain de naissance et anglais d’adoption, nous livre dans ce roman son étude de la société outre-Atlantique en 1904 lorsqu’il se trouve face à cette « vaste et brutale démocratie du commerce». A travers ses impressions immédiates, ses souvenirs et méditations, il nous révèle pourquoi l’Amérique nous fascine encore autant aujourd’hui.

La scène américaine de Henry James aux Éditions Minos La Différence, 17 euros

VIE ET AVENTURES DE SALAVIN


Une édition intégrale de cinq romans et une nouvelle.

Membre de l’Académie française, Georges Duhamel raconte ici les aventures de Louis Salavin qui, sur un coup de folie, a tordu l’oreille de son patron. Chassé de son emploi, il fait la connaissance de la solitude du banni, terrible liberté. Louis est un héros universel, modeste, plein d’interrogations existentielles et qui va finalement se forger un véritable destin. Un ouvrage préfacé par Antoine Duhamel et complété par un texte sur cette étrange intimité qui dura quinze ans entre le personnage et l’auteur. MaM

Vie et aventures de Salavin de Georges Duhamel chez Omnibus, 25 euros